lundi 21 octobre 2013

Carnet de route de Marine à Vegas




 
 

Qui a dit qu’il fallait de la chance au poker ? Voici une belle histoire, en tous les cas elle commence bien : en jouant le France Poker Tour à l’ACF, je vois un jeu concours sur une affiche depuis ma table. Le titre est plutôt alléchant : « Qualifiez-vous pour le Main Event des WSOP avec la personne de votre choix pour vous accompagner à Vegas grâce à notre tirage au sort ». En remplissant le formulaire je me dis que l’heureux gagnant en aura de la chance, se qualifier en 3 minutes quand les requins enchaînent les satellites online des nuits entières, c’est un peu comme arriver en limousine devant une boîte de nuit et passer devant tout le monde en VIP. C’est la classe. En même temps ça tombe bien, voici la version longue de mon article de septembre paru dans Poker VIP.




Quelques semaines s’écoulent, je regarde mes mails et au moment de supprimer les spams le titre d’un message attire mon attention : « Félicitations Marine, vous avez remporté notre jeu concours ». Ma première réaction « juste une publicité de plus, direction poubelle », mais quand je vois que l’expéditeur n’est autre que ACFpoker.fr, j’ouvre le mail dans la seconde et me rends compte qu’il est trop personnalisé, qu’il ne peut s’agir d’une newsletter. Je parcours les lignes à la vitesse de la lumière, mon cœur s’accélère quand je lis qu’on va m’appeler prochainement : « C’est vrai, J’ai gagnéeeee !!! »


La tête dans les nuages, j’apprends que nous serons logés 10 nuits au Bellagio, que nous avons le choix des dates aller/retour ainsi que le choix du day 1D qui me convient pour le Main. Je devais m’y attendre, la maison fait dans le sur-mesure. Normal pour une maison de haute couture, ce qui est bon à savoir pour les joueurs qui visent les gros tournois en live et n’ont pas encore de compte sur ACFpoker.fr. En 48h00 et seulement 3 semaines avant le départ tout était réglé : réservations, assurance voyage, interview, contact avec Ness sur place qui viendra ma chercher à l’aéroport…comment dire… à bord d’une limousine !

La pression commence à monter, Las Vegas j’arrive et j’ai une revanche à prendre sur l’année dernière. Je sortais de l’Event 54 juste avant la bulle avec mes as à tapis préflop. Cette année j’ai gagné le tirage au sort, le sort en est jeté, les dés sont lancés, faites vos jeux, les jeux sont faits, tout va très bien et je compte en découdre.


Samedi 9 juillet

En route pour Vegas, ce qui va nous changer de Paris qui tarde à passer en été. Cette fois nous avons prévu 3h00 d’avance à l’aéroport. Si vous parcourez mon blog vous savez que ma dernière expérience avec un aéroport n’a pas été une franche réussite, passons. Le trajet vers Seattle où nous avons escale passe très vite ; entre la vingtaine de films proposés, les CD, radios, jeux vidéo, il ne manque la poker room de l’Aviation Club sur les écrans. Arrivés à la douane, toujours un pur moment de bonheur aux U.S., on nous fait jeter tout aliment qui vient de l’étranger alors qu’en soute ça passe. Et même une canette de coca pas entamée, un comble. On remet à la douane un formulaire pour leur faire part de notre bonne foi, surtout après avoir coché que nous ne transportions pas d’élevage d’escargots. Est-ce parce qu’en France nous aimons manger ces pauvres petites bêtes ? Avec mon mari nous avons un peu de famille aux states mais je dois avouer n’avoir jamais pensé à leur offrir des œufs de gastéropodes en cadeau. Nos passeports sont enfin décorés du précieux cachet d’autorisation et je dois bien avouer que ce ticket a été plus long à obtenir que celui du Main Event. Direction la sortie avant le prochain avion, mon mari commence à avoir envie de fumer. Pas la moindre smoking area à l’intérieur, normal. Enfin à l’air libre, en compagnie d’autres touristes, il allume sa cigarette tant attendue. Un policier à vélo arrive à vive allure, les disputes avant de les envoyer à 300 mètres dans la (seule) smoking area, qui mesure 30 m2 pour une cinquantaine de fumeurs bannis, laissés pour compte en plein soleil d’une société qui n’assume pas les produits qu’elle fabrique.

Nous voici à Vegas, Ness et son mari nous attendent et on passe au Rio m’inscrire à l’avance pour demain. Direction le Bellagio. Notre chambre est magnifique, la vue donne sur la tour Eiffel pour ne pas être trop dépaysés. Nous-nous écroulons littéralement sous la fatigue.





Dimanche 10 juillet

C’est aujourd’hui le grand jour, me voici reposée. Direction le Spice Market au Planet Hollywood pour un petit déjeuner succulent et varié. On peut même y trouver des tacos mexicain ou de la paëla de bon matin, hum…







J’arrive en taxis au Convention Center du Rio. Dans les allées il y a des vendeurs en tous genres : barres chocolatées anti bad beats, boissons énergisantes pour enchaîner les tournois, chaussons relaxants pour partir du bon pied, livres de pros pour rattraper ses lacunes avant le grand oral, lunettes anti réflexion pour ceux qui en manquent, massage, bars à oxygène. Plus utile : des vestes chauffantes pour résister aux 15°C, température ambiante qui règne dans les salles de poker.
Je croise Vanessa Rousso, on se souhaite good luck le temps d’une photo avant de démarrer le tournoi. Je fais le vide, ce n’est pas rien de défendre les couleurs de l’ACF, de Poker Academie et de The Korporation, je suis fière de cette triple casquette.







Les croupiers à table sont très sympathiques et mettent à l’aise les joueurs. Etant étrangère, ils répètent les montants des mises pour être certains j’ai bien entendu. Les joueurs discutent entre eux ou se connaissent, peut-être ont-ils disputé un event sur la même table la veille ? L’ambiance générale est plutôt détendue, autour des joueurs les journalistes s’activent énergiquement sur leurs calepins, les flashs justifient le port de lunettes noires pour tenir la journée. Les caméramans font le marathon pour tenter d’avoir le plus possible de joueurs et pouvoir, lors du montage, retrouver dès le day 1 les November Nine.



Mon début de tournoi est assez difficile, d’entrée de jeu je dois folder un brelan flopé contre une quinte probable à la river vu le montant de la relance adverse. Heureusement vu la structure très deep avec 30 000 jetons et des niveaux de heures, ce n’est pas décisif pour la suite. Un peu plus tard, un shortstack me relace à tapis préflop pour 6K et je m’empresse de payer avec KK. Il retourne JJ et touche à la turn son jack. Deuxième coup dur. Dans le niveau 3, ma paire de dames se retrouve face à un brelan à la river. Me voici à 7K assez mal embarquée. Arrive un vrai rush où je touche les as et les rois à plusieurs reprises. Je suis d’autant mieux payée de j’ai une image agressive, petit tapis oblige ! Après ces rebondissements je termine le day 1 à 28K, plutôt heureuse d’être revenue de loin.



Lundi 11 juillet

Aujourd’hui repos. Pendant que les survivants des days 1A et 1C entament leur second round, je vais en profiter pour me remettre du décalage horaire. Direction la piscine du Bellagio. Après 10h00 de jeu et ce bruit incessant des jetons, j’apprécie le calme des fontaines, de quoi reprendre la suite dans les meilleures conditions. Direction l’Outlet Center, paradis du shopping situé à quelques miles du Strip. Des réductions de 40 à 70% sur des marques de prêt-à-porter, si on ajoute la parité €/$ favorable, c’est un move EV+ qui mérite le détour.



Mardi 12 juillet

Reprise du Main Event, aujourd’hui c’est le day 2B et nous reprenons sur des blinds 250/500 +50 d’antes. Je n’arrive à toucher un flop avec QJs, Ako mais je mise et mon second barrel à la turn est respecté. J’élimine ensuite deux joueurs shortstacks avec TT et KK, ce qui me permet d’arriver à 50K au milieu du niveau 7.
Arrive un coup difficile : je suis en BB avec JdJh et me contente de payer la relance du bouton pour masquer ma main. Flop : JsAh9h dont 2 cœurs. Je check il mise 2K, je relance à 6K et il suit. La turn dévoile une Qh. Je check il fait tapis et après réflexion je décide de passer. Il me montre KhTh et même si j’ai pris la bonne décision je retombe à 34K, retour à la case départ.
Je sors de cette édition 2011 au niveau 8, avec TT contre un joueur qui touche un brelan avec 44. Forcement déçue, je prends la direction de la sortie. J’espère pouvoir rejouer un tournoi de cette envergure prochainement et aller bien plus loin.



Mardi 13 au dimanche 17 juillet

La pression du tournoi commence à retomber, le moral remonte, il temps de profiter des vacances. Sin City est un parc d’attraction géant, ville lumière qui ne s’endort jamais. En déambulant sur le Strip, il n’est pas rare de croiser Elvis, Marilyn ou Michaël plus vrai que nature. Inondés de chaleur par 45°C à l’ombre, d’un vent chaud qui fait penser à un séchoir, pris en sandwich entre un évangéliste qui fait la quête et un racoleur qui propose les cartes de visite de filles nous n’avons d’autre choix que d’aller faire un tour dans les casinos.


Bien que dévalisé par Georges Clooney et Brad Pitt, le Bellagio n’en a pas perdu ses lettres de noblesse. Ce palace est absolument fabuleux : des tables de jeux à perte de vue, une dizaine de restaurants succulents pour ceux que nous avons testés, un jardin botanique aux mille couleurs et senteurs, une belle galerie d’art pour rapporter un Monet en souvenir après avoir gagné le jackpot, les qualificatifs manquent pour décrire cette impression de démesure. Que dire de la piscine, ou plutôt des piscines qui occupent un terrain de football ? Entourée de pins maritimes, du chant des oiseaux qui trouvent refuge dans ce jardin verdoyant aux couleurs de l’Italie, allongée sur une chaise longue à dorer au soleil, le moment est parfait, le rêve, le bonheur. Il ne me manque qu’un bon café serré, mais il suffit de demander un expresso pour être servie dans la minute. What else ?


Il est temps de grinder, direction le poker room pour une session de cash game. L’attente est un peu longue, il y a juste un petit tournoi à 10 000$ en cours, normal ! Je traverse la salle, une vingtaine de tables de cash game, les tapis vont de 200 à 20 000$, sympa. En allant chercher mes jetons, j’aperçois Doyle Brunson et Tom Dwan dans la Bobby’s room, l’antre des parties les plus chères au monde. Ils sont assis devant une montagne de jetons dont je n’ose imaginer leur valeur. Une table de NL 500 me convient très bien. Après deux heures de jeu et une grosse livraison je sors à 1 160$, cool. D’une manière générale à cette limite et en dessous, le style américain est assez loose passif même si on croise de très bons joueurs. Je vois beaucoup d’open limps UTG avec KJo, A3s, pour aller call contre en joueur une relance à 12BB. Par rapport à la France, je vois également un à deux joueurs par table qui effectuent des straddles. Le principe consiste pour le joueur UTG à poster 2BB avant la distribution. Ce joueur aura la parole en dernier préflop ; il en profitera souvent pour squeeze avec une grosse relance ou sur relance pour emporter le pot. J’ai également découvert cette variante depuis le bouton, ce qui donne l’avantage d’être dernier de parole préflop et postflop, intéressant.


L’offre en tournois et en cash game est très variable d’un casino à un autre, attention aux pièges à touristes ! Certains casinos comme le Planet Hollywood n’hésitent pas à prélever 10% de rake sans caper le pot en cash. J’ai pu voir également au Treasure Island un MTT à 50$ qui ne laissait que 35$ pour le prizepool, soit un rake de 30% ! Par contre les grandes poker rooms sont sérieuses, proposent des bonus en $ pour les paires d’as craquées, des bas beat jackpot ou encore du cash pour la meilleure main de la journée.

J’ai eu l’occasion de faire 4 MTT pour 3 places payées. J’ai vraiment good run, dommage que je n’ai pas eu un jeu comme ça au Main Event, mais je ne vais pas me plaindre c’est toujours agréable d’avoir quelques performances. Un jeu agressif, quelques tirages bienvenus, des flips qui passent quand il faut, bref Vegas m’a bien réussi cet été.
Une victoire au 50$ du Mirage qui a lieu deux fois par jours, nous étions 45 au départ. La structure est turbo, des rounds de 20 minutes et 5 000 jetons au départ. Il y avait beaucoup de joueurs qui découvraient le poker en live, j’ai pu assister à des choses assez comiques : un joueur en BB qui ne suit pas le tapis d’un shortstack avec une cote de 10/1 ou encore un joueur qui brûle sa main préflop en pensant que son adversaire était à tapis… on est loin des WSOP. Bilan 700$.
Au tournoi à 125$ de l’Aria, la structure est plus correcte, 10 000 jetons et des niveaux de 30 minutes. Nous étions 79 pour 7 places payées, les prix allant de 220 à 2050$. Après 6h00 de jeu et 6 joueurs restants, un deal est proposé comme souvent à Vegas. J’ai accepté les 764$ proposés au vu de mon petit tapis. Je reviendrai dans un prochain article sur les différents deal possibles lors d’un tournoi, savoir comment bien les évaluer.
Petit passage à vide sur un Megastack Series du Caesar Palace, dead cards tout le long, rien à signaler.
Toujours à l’Aria, sur un daily à 230$ et 15000 jetons au départ, j’ai réussi à me hisser en 3ème place pour un gain de 3080$ et de beaux souvenirs de Vegas !




Lundi 18 juillet

Un peu coupée du monde et du temps dans cette ville, nous réalisons à regrets que c’est notre dernier jour ici. En préparant les valises j’allume la télé pour la première fois depuis notre arrivée et tombe sur la chaîne ESPN qui diffuse les WSOP en léger différé. Ils ne sont plus que 57 au début du Day 7. Un visage me semble familier… lunettes, cheveux roses, mais bien sûr ! C’est Guillaume Darcourt qui a sorti le grand jeu, une montagne de jetons devant lui et qui pourrait bien marquer l’histoire du poker. La valise pourra bien attendre, nous nous précipitons dans un taxi, direction le Rio pour aller l’encourager. Les allées du Convention Center sont désertes, les stands en tous genre ont fermé boutique jusqu’à l’année prochaine. Nous arrivons au terme de cette édition 2011 des WSOP, des fortunes se sont faites, 57 champions ont gagné leur bracelet. Cette année marquera à jamais le poker dans l’hexagone avec un record à peine imaginable : 4 titres ! Le meilleur est peut-être encore à venir pour nous, un 5ème bracelet doré ne serait pas de refus. Guillaume en est capable, il a les tripes pour aller le chercher ça ne fait aucun doute. Au passage il reste 41.164.567 $ qui attendent de trouver preneurs.

Nous arrivons à l’Amazon Room, il n’y a plus que quelques tables et bien un couvreur par joueur, sans compter les équipes télé que ne veulent rien manquer du spectacle. Guillaume joue à la seconde table, le sourire aux lèvres, sous le feu des projecteurs et caméras. Quelques frenchies scandent « Pink Boa, Pink Boa » et nous rejoignons la fête. Rémy Biechel nous dresse le tableau : Guillaume marche littéralement sur la table, a déjà eu deux fois les as, une fois les rois et vient de toucher une quinte qui le propulse second du classement, whaou !



Remy nous apprend qu’un autre français et pas des moindres est encore en course. Stéphane Albertini, 6ème à l’EPT Deauville de 2010 et membre de la team Poker Leaders est en table télé. Le temps de monter dans les gradins, on aperçoit Stéphane debout en train de jouer son tournoi préflop avec AK contre QQ chez son adversaire. Laurie Bismuth, Antonin Teisseire, Kool Shen sont là pour le soutenir. Le sort en décidera autrement et sa quinte à la river donne un full à son adversaire.


Nous revenons supporter Guillaume, la pression est énorme. Avec Caroline son épouse, Rémy et Yann Enzinger, nous vivons avec intensité chacune de ses actions, suspendus aux rares annonces inaudibles du speaker, voire incompréhensibles car le board n’est pas retransmis sur les écrans. A la pause Guillaume est confiant mais la suite est bien triste : un bluff raté contre Ben Lamb qui est prêt à mettre son tournoi en jeu, suivi par une grosse confrontation à tapis préflop contre Brian Devonshire. Un setup inévitable, les rois pour Guillaume contre les as chez son adversaire et le miracle tant attendu n’a pas lieu. Il lui reste 2 millions de jetons, soit 20BB et rien n’est perdu. Une ultime confrontation contre Ahtoh Makiievskyi sur un flip met fin aux espoirs de notre dernier français si proche du Graal. Connu pour son agressivité sans limite, parfois détracté par ceux qui oublient que l’on joue à un jeu no limit, Guillaume fait partie de ses élites du poker qui ont encore les plus belles pages à écrire devant eux. Pour nous avoir fait rêver, merci. Rendez-vous début 2012 au tournoi ladies de Deauville ? Tu as une revanche à prendre mais contre les cheveux roses je n’ai aucune chance...

















1 commentaire:

  1. Bon je te mets un petit mot içi (ça fait toujours plaisir), car fait sur PA. Super ton article et sniff de ne pas avoir été avec vous...Lol Bisous et bravo pour tes perfs.

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